Le PSG contourne le "Fair-play financier"

Le PSG contourne le « Fair-play financier »

Le message a été martelé ces dernières semaines : le football européen est un malade convalescent en voie de guérison. Alors que la Ligue des champions reprend ses droits – le Paris-Saint-Germain affronte l’Olympiakos mardi 17 septembre, Marseille reçoit Arsenal le mercredi 18, les dirigeants de l’Union européenne de football (UEFA), qui se réuniront en comité exécutif à Dubrovnik (Croatie), jeudi et vendredi, soulignent les progrès des clubs. « Il y avait 1,7 milliard de pertes en 2011, il y en a 1, 1 milliard en 2012, soit une diminution de 36 % en un an », se félicite le secrétaire général de l’UEFA, Gianni Infantino, qui souligne que cet enrayement des déficits est « une première en six ans. Parfois, il y a des bonnes nouvelles ».

L' »autosatisfecit » n’a rien d’anodin. Les organisateurs du football continental veulent y voir les premiers effets bénéfiques de la mise en place du fair-play financier (FPF). Lancé en 2009, ce chantier cher au président de l’UEFA, Michel Platini, entre cette saison dans la phase ultime de sa mise en place, avec comme objectif que les clubs ne   dépensent pas plus qu’ils ne gagnent.

Depuis 2011, les équipes accusant des arriérés de paiement peuvent être sanctionnées. Le club espagnol de Malaga, quart-de-finaliste de la Ligue des champions en avril, a ainsi été exclu de toute compétition européenne en 2013-2014 à cause de ses dettes. Un palier supplémentaire sera franchi cette saison, avec l’obligation de présenter des comptes équilibrés et un déficit autorisé de 5 millions d’euros – en excluant les dépenses liées aux stades et aux centres de formation -, ou 45 millions d’euros dans le cas où des actionnaires pourraient combler les pertes. Les premières sanctions tomberont dès mai 2014, avec de possibles exclusions des coupes continentales.

Si l’Association des clubs européens a validé à l’unanimité les principes du FPF en 2010, tous n’en respectent toujours pas les règles. Et, comme un paradoxe, alors que l’UEFA clame sa volonté d’assainir le football, les dépenses somptuaires ont encore rythmé le mercato estival. Fin août, le Real Madrid a ainsi déboursé 100 millions d’euros pour accueillir Gareth Bale, un record. Les « clubs de milliardaires » du PSG et de Monaco ont, à eux deux, dépensé quelque 270 millions d’euros pour étoffer leurs effectifs. Du jamais-vu en France.

QUELLES SANCTIONS ?

Le PSG, propriété des Qataris, peut s’appuyer sur le contrat de sponsoring signé avec la Qatar Tourism Authority, pour un montant avoisinant les 200 millions d’euros annuels jusqu’à la saison 2015-2016. Une manière de contourner les contraintes à venir du FPF. « Les clubs de milliardaires sont en train de signer des contrats pour des montants faramineux avec des entreprises ou des fondations très proches des actionnaires, comme c’est aussi le cas avec Manchester City, sponsorisé par Etihad Airways, explique Bastien Drut, auteur de L’Economie du football professionnel (La Découverte, 2011). L’UEFA a annoncé, il y a plus d’un an, qu’elle allait lancer une enquête sur ce contrat. Depuis, nous n’avons toujours pas de nouvelles de cette enquête. »

La situation a été dénoncée à demi-mot par Uli Hoeness dans L’Equipe, en avril : « J’espère que Platini va tenir sa promesse et faire en sorte qu’à l’avenir le fair-play financier soit respecté par tous les clubs. Si ce n’est pas le cas, croyez-moi, on saura mettre le doigt là où ça fait mal. » Depuis, le président du conseil de surveillance du Bayern Munich, club montré en exemple pour sa gestion, s’est fait discret : il est au coeur d’un scandale d’évasion fiscale.

La marge de manoeuvre pour punir les clubs contrevenants risque cependant de se révéler très étroite. « L’UEFA tire l’essentiel de ses revenus de la vente des droits télé en Ligue des champions, souligne Bastien Drut. Or pour bien vendre cette compétition, la présence des meilleurs clubs européens comme Chelsea, le Real, le Bayern ou le PSG est nécessaire. » Michel Platini se veut rassurant : « Nous ne sommes pas là pour tuer les clubs. » Le règlement du FPF autorise différentes sanctions allant de la déduction de points en phase de poules à l’exclusion pure et simple, en passant par la sanction financière. « Il y aura des ajustements, prévoit Bastien Drut. Mais il demeure un grand flou artistique puisque l’on ignore, parmi cette palette, quelle sanction sera appliquée en cas de dépassement du déficit autorisé. »

Au-delà de sa capacité à sévir contre les gros clubs dont elle peut difficilement se passer, l’UEFA risque de voir son cheval de bataille contesté sur le terrain du droit, même si Michel Platini peut se targuer du soutien de Joaquin Almunia, vice-président de la Commission européenne et commissaire à la concurrence. Didier Primault, économiste au Centre d’économie et de droit du sport de Limoges, résume le dilemme : « Comment réussir à mettre en oeuvre le fair-play financier alors qu’il porte atteinte juridiquement à la liberté d’entreprendre ? »

Interdire à de riches propriétaires d’investir à pertes dans leur club s’annonce ardu. « Des clubs contesteront leurs sanctions, et certaines batailles juridiques seront très longues alors que le temps sportif est très court« , anticipe Bastien Drut. Un observateur avisé qui a participé à la mise en place du FPF ne croit plus à sa réussite : « Des clubs comme le PSG ou Monaco iront en justice pour atteinte à la libre entreprise et à la libre circulation des capitaux, droits encouragés par l’arrêt Bosman. »

Pour l’instant, seul un agent de joueurs belge, Daniel Striani, a saisi la Cour de justice de l’Union européenne contre le FPF, le 6 mai. Son avocat, Me Jean-Louis Dupont, est bien connu des instances européennes. Il était, dans les années 1990, l’un des défenseurs de Jean-Marc Bosman, un joueur dont le combat juridique révolutionna le système des transferts en Europe.

Source : Lemonde

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