Coupe du Monde Qatar 2022 : Quel bilan pour TF1 et beIN SPORTS ?

Coupe du Monde Qatar 2022 : Quel bilan pour TF1 et beIN SPORTS ?

La 22ème édition de la plus prestigieuse compétition de football s’est achevée ce dimanche par une finale légendaire remportée aux tirs au but par l’Argentine face à la France.

Une défaite rageante pour l’équipe de France, une audience historique pour TF1, avec plus de 24 millions de téléspectateurs en moyenne entre 16h et 19h ce dimanche 18 décembre 2022, un pic d’audience tout aussi inédit au-delà des 29 millions de français rassemblés selon Médiamétrie. Telle est la dernière impression affichée par une édition pas comme les autres. Dans le détail, le bilan globalement positif, mérite quelques nuances.

Les bleus font exploser l’audience de TF1

La première chaine était, pour la troisième fois consécutive, le seul acteur gratuit à diffuser la Coupe du Monde en France. 28 matchs ont été proposés, dont une large majorité à 20h. En dehors de l’équipe de France, les audiences des matchs ont affiché des niveaux excellents, jusqu’à 9,94 millions de téléspectateurs pour la demi-finale Argentine/Croatie. Ces chiffres sont cependant orientés à la baisse en comparaison avec les matchs équivalents en 2018 (-18% sur la phase de poules et les huitièmes de finale de 20h).

Concernant les matchs diffusés en journée, le bilan est meilleur, à la fois pour le match d’ouverture (5,1 millions de téléspectateurs contre 4 millions en 2018 à un horaire bien moins favorable), pour le quart de finale Maroc/Portugal (7,5 millions de téléspectateurs, un record pour un quart de finale en journée sans la France) et pour la petite finale Croatie/Maroc (7,3 millions contre 5,6 millions en 2018).

Le principal point positif est cependant lié au parcours de l’équipe de France, finaliste de la compétition. Après les interrogations initiales liées aux scores des premiers matchs (12,59 millions pour France/Australie à 20h contre 12,54 millions pour la même affiche en 2018 un samedi 12h, puis 11,59 millions pour France/Damenark un samedi 17h contre 10,72 pour France/Pérou un jeudi à la même heure), les deux matchs suivants ont réalisé de meilleurs scores qu’il y a 4 ans pour des cases horaires comparables.

Mais c’est bien à partir des quarts de finale que les audiences se sont emballées puisque France/Angleterre a rassemblé 17,7 millions de français en moyenne, un score très proche de l’audience réalisée en 2006 par le mythique Brésil/France au même stade de la compétition et à un horaire similaire. Puis, ce sont donc 20,7 millions de téléspectateurs qui ont assisté à la demi-finale France/Maroc (19,1 millions en 2018), avant l’audience historique réalisée par la finale.

Cette édition est la première durant laquelle Mediamétrie inclut dans l’audience communiquée le lendemain l’ensemble de l’audience dite hors domicile. Celle-ci correspond à celle réalisée dans les bars et lieux publics (écrans géants), mais aussi en déplacement (sur une tablette) ou chez un tiers (télévision d’un proche). Auparavant, seuls les comportements des panélistes au sein de leurs foyers (et de leurs invités, sur déclaration) étaient considérés.

L’arrivée des nouvelles technologies avec une multiplication des supports de diffusion a contraint Mediamétrie à faire évoluer ses méthodes de comptabilisation. En 2018, Mediamétrie avait déjà pu estimer à posteriori que les bars et lieux public avaient permis un gain d’environ 25% d’audience par rapport à celle communiquée (20,3 millions sur TF1 et beIN SPORTS), soit plus de 5 millions d’individus supplémentaires environ, sachant que les 20 millions incluaient 15% d’invités, soit environ 3 millions.

Cette année, le hors domicile est pleinement inclus dans l’audience de TF1 publiée le lendemain. Et il représente 24% de l’audience de la finale, soit 6 millions de téléspectateurs hors domicile, selon une communication de l’institut à l’AFP. Par conséquent, nous pouvons estimer qu’à méthodologie constante, les deux finales ont attiré entre 25 et 26 millions de téléspectateurs en moyenne sur les deux diffuseurs et en incluant les lieux publics.

Une Coupe du Monde probablement rentable pour TF1

Au-delà de ces histoires de records d’audience, certes prestigieux pour l’image de marque de TF1, la diffusion d’une Coupe du Monde est un pari financier, que les comptables des diffuseurs ont pris l’habitude d’inclure dans la colonnes « pertes » des bilans annuels. Pourtant, et c’est inédit depuis 20 ans, cette acquisition devrait offrir un bénéfice au groupe Bouygues.

Cela s’explique d’abord par les conditions d’achat, bien plus profitables. En 2016, les deux éditions 2018 et 2022 étaient acquises en commun avec beIN SPORTS, pour un montant à la charge du groupe TF1 de près de 75M€ par édition. C’est inférieur aux montant avancés pour les éditions 2014 (130M€ moins une sous-licence à beIN SPORTS estimée entre 30 à 40M€), 2010 (120M€ moins une sous-licence de 33M€ aux groupes Canal+ et France Télévisions) et 2006 (100M€ pour 24 matchs). C’est en revanche proche du montant de l’exclusivité d’une édition 2002 (près de 70M€) aux horaires défavorables.

Ces conditions d’achat sont une aubaine d’autant que les matchs achetés viennent remplacer des programmes dont le coût est bien plus important que ce que les équipes de TF1 programment habituellement au mois de juin/juillet. De fait, le surcoût net de la compétition dans la valeur totale de la grille sur l’année est moins important qu’en 2018.

TF1 bénéficie ensuite sur le front des recettes d’un contexte publicitaire bien plus favorable. Si la période de l’année n’a pas eu d’impact clair sur les audiences comme cela aurait pu être attendu (plus de monde étant habituellement devant la télévision à la fin de l’automne qu’au début de l’été, le potentiel d’audience était plus élevé), ce n’est pas un problème pour la régie publicitaire. En effet, les annonceurs sont bien plus nombreux et généreux à l’approche des fêtes de fin d’année.

En plus des marques ayant l’habitude de communiquer lors des grands évènements sportifs, TF1 Pub a pu compter sur celles ayant l’habitude de communiquer à cette période de l’année. De fait, le seuil de rentabilité était bien plus évident à atteindre, et si quelques interrogations existaient en début de compétition, les hommes de Didier Deschamps ont fait le reste.

Car le dernier facteur déterminant, c’est le parcours de l’équipe de France. Les matchs des bleus ont donc réalisé de très fortes audiences, permettant de vendre des spots publicitaires à prix d’or jusqu’au bout de la compétition, et particulièrement à partir des quarts de finale. Aussi, le spot publicitaire le plus cher avant remises de l’histoire de la télévision française a été commercialisé à l’occasion de la finale, avec un tarif affiché de 429.000€ les 30 secondes au moment de la mi-temps.

Un contexte moins porteur pour beIN SPORTS

Pour beIN SPORTS, cette compétition arrivait dans un contexte bien différent de 2018. A l’époque, grâce à un catalogue de droits alors à son apogée (lot premium de Ligue des Champions, Ligue 1), la chaine profitait de l’évènement pour revendiquer 4 millions d’abonnés. Il a depuis fallu faire sans Ligue des Champions trois saisons durant, sans Ligue 1 depuis 2020, et désormais avec un modèle économique plus rationnel, couvert par la distribution exclusive accordée au groupe Canal+. De fait, la chaine ne disposerait cet automne plus que 2,7 millions d’abonnés selon L’Équipe, après être tombée à 2,2 millions. Cette chute ne date pas d’hier, puisque L’informé nous indique que la chaîne disposait de 2,6 millions d’abonnés au second semestre 2020.

Le lancement de cette compétition s’est donc déroulé dans un contexte paradoxal, alors que ce mondial constitue le sommet tant attendu pour beIN Media Group. Aussi, selon nos informations, les audiences des deux premières journées de la phase de poules en dehors de l’équipe de France et des exclusivités se sont orientées à la baisse par rapport à 2018, avec une perte plus conséquente en soirée. Par ailleurs, les choix de TF1 et le format plus réduit de la compétition n’ont offert aucune exclusivité à 20h sur ces deux premières journées contre trois en 2018. A l’époque, ces trois matchs avaient dépassé le million de téléspectateurs, avec jusqu’à 1,32 million pour Iran/Espagne.

Cette année, il a fallu attendre les quarts de finale pour voir la chaine atteindre le million de téléspectateurs de moyenne grâce à Croatie/Brésil (1,31 million) et même un pic record (2 millions) pour un mondial sur la chaîne grâce à ses prolongations. C’est un record d’audience moyenne pour un quart de finale sur beIN SPORTS, mais un score inférieur au record de 2018 avec le huitième de finale Espagne/Russie (1,47 million).

Concernant l’équipe de France, les résultats communiqués par la chaine sont similaires aux chiffres de 2018, avec trois rencontres décisives au million et un record légèrement supérieur cette année (1,07 contre 1,06 million pour la demi-finale). En 2018, Florent Houzot, directeur de la rédaction de beIN SPORTS, rappelait que ces chiffres devaient être à relativiser en raison de l’absence des bars dans la comptabilisation. Ceux-ci semblent désormais inclus, au même titre que pour TF1. Si tel est le cas, cela traduirait une nette baisse pour ces grands matchs vis-à-vis de 2018, le total en incluant le hors domicile en 2022 étant équivalent aux audiences sans les bars de 2018. Cela pourrait également poser question sur la fiabilité de cette mesure nouvelle, tant beIN SPORTS est représentée dans les bars du pays pendant ce type de compétition.

Malgré cela, c’est la satisfaction qui est affichée par la chaine dont l’antenne a été dynamisée par un droit premium en milieu de saison. De quoi rappeler la qualité de son offre football aux amateurs, mais également communiquer sur le retour de clubs français de Ligue 1 grâce à l’arrivée de la Coupe de France.

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