Paris 2024 : Qui remportera les jeux olympiques en clair ?

Paris 2024 : Qui remportera les jeux olympiques en clair ?

À ce jour, seuls deux acteurs de la télévision gratuite ont officiellement confirmé qu’ils s’invitaient à la table des discussions. France Télévisions, candidat naturel à l’obtention d’une sous-licence, a ainsi déclaré par l’intermédiaire de sa présidente que le groupe public visait en priorité ces droits. Dans le même temps, le numéro 2 de TF1, Ara Aprikian, indiquait au cours d’une conférence de presse que son groupe allait prêter une attention soutenue à l’appel à intérêts lancé par le titulaire des droits ; à savoir l’américain Discovery propriétaire d’Eurosport. D’autres acteurs ont probablement formulé une offre mais ont préféré être discret sur leurs desseins.

Une compétition qui intéresse traditionnellement peu les chaînes commerciales

Sur le marché français, les jeux olympiques ont une valeur importante. Néanmoins, si l’on compare les performances d’audiences de cette épreuve avec les autres grands événements sportifs internationaux, on remarque que les JO n’obtiennent que la quatrième place dans le classement des compétitions les plus suivies derrière la Coupe du Monde de football, l’Euro de foot, et le mondial de Rugby.

Bien sûr le fait que les jeux se dérouleront à Paris en 2024, apportera un substantiel surplus d’audiences. Mais pour une télévision commerciale il est difficile de convertir en monnaie trébuchante la forte mobilisation du public sur un tel événement. D’abord parce que les principales pointes d’audiences sont instantanées. Même en faisant preuve d’une incroyable inventivité, une régie publicitaire aura bien des difficultés à monétiser un 100 mètres qui en théorie durera moins de 10 secondes.

D’autant que les Jeux Olympiques 2024 auront lieu sur la première quinzaine d’août. C’est la période la plus creuse en termes d’investissements publicitaires pour un diffuseur commercial puisque les annonceurs font des provisions pour la rentrée. Investir sur les jeux olympiques c’est donc assurément mettre en péril son compte d’exploitation pour une chaîne comme TF1 ou M6. Cela revient aussi pour elles à faire l’impasse sur l’Euro 2024 qui est, on l’a vu, un droit assez stratégique. Outre ces deux grandes chaînes, une offensive d’autres acteurs privés n’est pas à exclure. Mais les nombreux inconvénients que nous avons pu énumérer pour TF1 et M6 valent également pour eux.

Ce n’est donc pas un hasard si partout en Europe, les Jeux Olympiques reviennent aux groupes publics. Malgré les coupes budgétaires qu’ils subissent, les télévisions financées par la redevance ont des revenus assurés sur le long terme quand les chaînes vivant de la publicité n’ont qu’une connaissance prospective du marché. Sept années, cela laisse certainement la  possibilité d’intégrer un investissement important aux comptes mais ce délai représente néanmoins une éternité en matière de télévision. Avec des  modes de consommation en perpétuels mouvements et des interrogations de plus en plus en prégnantes sur leur modèle économique, la tâche est compliquée pour les chaînes privées. Une idée que le président de TF1, Gilles Pelisson a parfaitement résumé en parlant d’une acquisition qui « n’était pas vitale » pour le groupe qu’il dirige.

Les exigences de Discovery

Cet appel à intérêts a un caractère quelque peu atypique. D’habitude nous connaissons assez clairement ce qui est mis en vente avant que la bataille entre les différents acteurs ne s’engage. Dans ce cas de figure, c’est l’inverse. Plusieurs chaînes ont signalé leur intérêt avant que l’on ne sache précisément ce qui était à glaner. Le seul élément qui est assuré à ce jour est que 200 heures de retransmissions seront exposées en clair durant ces JO 2024 en vertu de l’accord signé en 2015 entre le CIO et Discovery.

On peut bien-sûr regarder attentivement la nature et le contenu des sous-licences qui ont été à ce jour signées par Discovery sur le reste du continent. Il apparaît tout d’abord que la firme américaine a abouti à des accords très disparates entre les différents marchés. Ce qui peut s’expliquer par l’enjeu de taille que représente ces négociations pour une entité  qui a dépensé 1,3 milliard d’euros afin de  devenir la gardienne des droits des jeux olympiques.

Partout, le volume horaire minimal imposé par le CIO a en tout cas été largement dépassé. Le public, sauf énorme surprise, devrait donc avoir accès à la quasi intégralité des épreuves puisque Discovery ne s’est pas opposé à fournir des droits complets et « tous supports » à ses partenaires.

Il est en revanche très probable qu’Eurosport se réserve, en France comme ailleurs, quelques exclusivités sur un certain nombre d’épreuves pour  proposer une plus value à ses abonnés.

Ce sont quoi qu’il en soit  des négociations très disputées qui ont lieu actuellement entre les diffuseurs français et l’opérateur américain. Ce dernier n’est pas prêt à brader sa ou ses sous-licences tandis que les médias intéressés ont déjà souligné le fait qu’ils ne consentiraient pas d’efforts déraisonnables. Dans ces circonstances, un fractionnement des droits semble inéluctable et on pourrait alors se retrouver avec une répartition des droits proche de celle que l’on a connu pour les Jeux olympiques de Londres.

Ce dernier cas est d’ailleurs à plus d’un titre intéressant pour envisager l’appel d’offres en cours. Les droits pour l’échéance 2012 avaient été négociés en 2004, année où Paris figurait parmi les favoris  pour devenir le pays hôte. TF1, malgré la possibilité que les jeux aient lieu en France, n’avaient pas jugé intéressant de s’emparer des droits de retransmission de l’ensemble des épreuves. La chaîne privée avait préféré jeter son dévolu sur les cérémonies d’ouverture et de fermeture (un magazine de résumés qui était inclus dans la corbeille de la mariée avait été plus tard revendu à BeIN sports). Dans un environnement plus compliqué encore de nos jours, alors que sa position hégémonique s’est largement fragilisée, il ne serait pas incongru que TF1 fasse à Discovery une proposition assez proche de celle qu’elle avait formulée à l’ayant droit il y a maintenant 13 ans. Les cérémonies sont il faut le dire extrêmement attendues par les téléspectateurs et sont plus rémunératrices pour une chaîne qui tire ses recettes de la publicité . Car si TF1 n’avait pas été remboursée à l’euro près des 12 millions d’euros versés pour proposer les cérémonies de Londres 2012, elle lui avait valu deux gigantesques succès d’audiences. C’est d’ailleurs à en croire plusieurs études le moment que le public attend en priorité.

Selon une source que nous avons pu approcher à France Télévisions, l’inquiétude est grande qu’une chaîne concurrente vienne pourtant  « lui voler cet événement historique ». Le groupe est en effet à  nouveau appelé à se serrer la ceinture.  Et il aurait aimé que les choses se décantent aussi facilement qu’au Royaume-Uni où un accord de réciprocité avait largement facilité les discussions…

Mais 15 jours avant que le CIO n’officialise son pacte historique avec Discovery, France Télévisions, qui avait obtenu comme la BBC de manière directe les droits des JO 2018 et 2020, annonçait avoir attribué une sous-licence au groupe Canal portant sur les JO 2016 et 2020. Le seul actif que France TV a désormais en sa possession pour conduire la négoce est donc Pyeongchang 2018. Un bien maigre actif pour espérer un échange de bons procédés aussi simple qu’il ne l’a été outre manche.

En définitive, Discovery a les pleins pouvoirs pour gérer la répartition des JO 2024 entre les différents rivaux du marché hexagonal. Néanmoins, la firme américaine, qui a investi 1,3 milliard pour contrôler ces prestigieux droits  sur l’ensemble du continent européen, doit impérativement obtenir les accords les plus rémunérateurs possibles afin d’amortir sa mise de fonds considérable. Elle s’est même résolue à accorder les droits des JO 2018 à 2024 au duo ZDF/ARD pour 250 millions d’euros alors qu’elle escomptait un montant bien plus important. L’opiniâtreté des chaines publiques allemandes face aux exigences extravagantes du détenteur des droits avait fini par payer. Le verdict final, qui devrait être connu d’ici peu, aura donc quoi qu’il arrive été le fruit de tractations très serrées.

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